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Plateformes décentralisées : et si on reprenait (vraiment) le contrôle ?



Plateformes décentralisées : et si on reprenait (vraiment) le contrôle ?

On les utilise tous les jours. Pour jaser avec notre équipe. Pour rejoindre notre public. Pour partager nos idées. Les plateformes comme Facebook, Instagram, YouTube, Twitter (ou X si vous préférez, 🤮) sont devenues les vitrines numériques de notre monde.

Mais depuis quelques années, une question se pose de plus en plus sérieusement : a-t-on encore du contrôle sur nos données, nos communications, notre présence en ligne ? Et si, collectivement, on explorait des façons de s’éloigner (juste un peu) des GAFAM ?

Bienvenue dans l'univers des plateformes décentralisées. Celles qui reposent sur des logiciels libres, qui respectent la vie privée et qui ne vous poussent pas du contenu à coups d'algorithmes anxiogènes.

Un petit rappel : c’est quoi, être « décentralisé » ?

Une plateforme décentralisée, ce n’est pas une techno magique. C’est une façon de faire. Au lieu d'avoir un serveur central (comme Facebook, qui décide tout), on a un réseau de serveurs autonomes qui discutent entre eux. Chacun choisit ses règles, son approche, son hébergement.

Comme le courriel. Vous pouvez écrire de Gmail à Outlook sans avoir à y penser. C’est la même logique pour Mastodon, PeerTube, Matrix, etc. On appelle cet univers le Fediverse.

Dans les faits, ça donne :

  • Plus de résilience.
  • Moins de dépendance à une seule entreprise.
  • Un meilleur contrôle sur vos données.

Et surtout : pas d'algorithme pour décider à votre place ce que vous voyez. C’est la liberté de choisir son propre environnement numérique, adapté à ses valeurs, ses besoins, ses contraintes.

Petit tour du proprio du Fediverse (et compagnie)

Voici quelques plateformes décentralisées (majoritairement libres) qui valent le coup d’œil.

Mastodon

Alternative à Twitter, créée en 2016. On y retrouve des fils d'actualité chronologiques, pas de pubs, et une communauté en pleine croissance. Chaque serveur (ou "instance") est autonome, mais connecté au reste du réseau. Ça s’utilise facilement via des applis mobiles modernes. Et en 2024, on parle de plus de 15 millions de comptes actifs. Ce n’est pas encore Facebook, mais ce n’est plus une niche.

PeerTube

Alternative à YouTube. Vos vidéos sont hébergées localement (par vous ou par des collectivités), et peuvent être partagées avec d'autres instances. PeerTube permet de diffuser sans céder ses droits ni confier ses données à Google. C’est adopté notamment par des collectivités publiques en Europe.

Pixelfed

Alternative à Instagram, axée sur la photo. Interface simple, sans collecte de données, avec une approche esthétique soignée. Et en prime, on peut interagir avec les utilisateurs de Mastodon, grâce au protocole ActivityPub.

Matrix (et Element)

Protocole de messagerie décentralisée. Utilisé par le gouvernement français pour Tchap. Sécurisé, interopérable, auto-hébergeable. Bref, une alternative très solide à Teams ou Slack. Les données peuvent rester sur vos serveurs. Et on peut l’intégrer à Nextcloud, Rocket.Chat ou d’autres outils libres.

Lemmy

Clone de Reddit, mais décentralisé. Génial pour les communautés thématiques, surtout si vous avez fui les changements controversés de Reddit dernièrement. Des milliers de sous-communautés y sont déjà actives.

Diaspora*

Un des pionniers. Né en 2010 avec une ambition claire : décentraliser le réseau social. Moins actif aujourd’hui, mais toujours fonctionnel et maintenu par sa communauté. Il a préparé le terrain pour Mastodon.

D'autres en vrac

  • BlueSky : développé par l’ex-PDG de Twitter. Encore en version bêta, mais prétend ouvrir le jeu avec son propre protocole (AT Protocol).
  • Nostr : très minimaliste, aimé de la communauté Bitcoin et des fans d’autonomie numérique.
  • Mattermost, Rocket.Chat : messageries d’équipe, open source, hébergeables en interne. Très populaires dans les organisations soucieuses de contrôle.

Pourquoi ça devrait intéresser les entreprises d’ici ?

1. Souveraineté numérique

Si vous utilisez une plateforme centralisée, vos données peuvent être assujetties à des lois comme le Cloud Act, même si vos serveurs sont au Canada. C’est un enjeu réel, surtout avec la Loi 25. Les plateformes décentralisées permettent d’héberger localement, de maîtriser les flux de données, et de mieux protéger les renseignements personnels.

2. Résilience et autonomie

Quand Meta bloque les médias canadiens, ou que Twitter change brutalement ses API, ce sont vos communications qui en souffrent. Avec les alternatives décentralisées, vous avez le choix de l’instance, de la gouvernance, du code. C’est un levier stratégique.

3. Zéro pub, zéro algorithme

Le fil d’actualité est chronologique. Vous parlez à votre public, sans filtre ni interposition commerciale. Et pour les usagers, c’est un environnement moins anxiogène, moins captif, plus respectueux.

4. Positionnement éthique

En tant qu’organisation, choisir des outils libres, décentralisés et transparents est un acte de positionnement. Cela renforce votre image de marque, attire les talents sensibles à ces enjeux, et vous distingue dans un paysage dominé par les Big Tech.

5. Coûts et agilité

Les outils FOSS peuvent être hébergés à faible coût, adaptés à vos besoins, connectés entre eux. Pas de licence opaque. Pas de verrouillage commercial. Vous êtes libre de faire évoluer votre stack numérique.

Est-ce que c’est réaliste, ici au Québec ?

Oui. Des projets comme Qlub.social, développé au Québec sur Mastodon, ont montré qu’on pouvait créer localement des espaces de discussion sains, sans pub ni algorithmes. Et l’UE a mené des projets pilotes (EU Voice, EU Video) pour créer ses propres plateformes, souveraines, accessibles, transparentes.

Il reste du chemin, bien sûr. Les habitudes sont tenaces. Mais les choses bougent. Et chaque entreprise peut commencer modestement : tester, observer, accompagner ses équipes. C’est une démarche incrémentale.

Le mot de Blue Fox

Non, on ne vous dit pas de tout quitter du jour au lendemain. Mais on vous invite à réfléchir. À tester. À déployer en interne. À ouvrir un compte, juste pour voir. À discuter avec votre équipe TI. À proposer à vos membres ou partenaires une alternative.

Et si la décentralisation était l’une des clés de votre autonomie numérique ?

La prochaine fois que vous publiez un post important, demandez-vous : est-ce que je suis en train de bâtir une relation, ou de nourrir un algorithme ?








Plateformes décentralisées : et si on reprenait (vraiment) le contrôle ?
Olivier Morneau 27 juin 2025
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