TL;DR
Les logiciels libres pour dossiers médicaux électroniques (comme OSCAR, OpenEMR, DoliMed) offrent aux cliniques médicales, dentaires et thérapeutiques une alternative gratuite, sécuritaire et flexible aux solutions propriétaires.
✅ Moins chers
✅ Hébergement local = protection des données
✅ Conformes à la Loi 25
✅ Réduction de la dépendance aux GAFAM
✅ Favorisent la souveraineté numérique et l’expertise locale
👉 Idéal pour les PME du secteur de la santé qui veulent garder le contrôle sur leurs données et respecter les lois québécoises.
Les logiciels libres et open source (Free/Open Source Software – FOSS) offrent aux cliniques, cabinets et patients québécois des solutions de dossiers médicaux électroniques (DME ou EMR) plus transparentes et contrôlables. Un logiciel libre signifie que son code source est accessible, modifiable et distribué gratuitement : il n’est pas « propriété » d’un unique fournisseur imposant licences et coûts élevés. De nombreux projets FOSS existent aujourd’hui pour gérer les dossiers médicaux (médicaux, dentaires, thérapeutiques, etc.), adaptés aux petits cabinets et entreprises de santé. Ces solutions permettent aux professionnels de santé et aux patients de conserver leurs données de santé localement ou dans un environnement maîtrisé, renforçant ainsi la souveraineté numérique – c’est-à-dire le contrôle du Québec et de ses citoyens sur leurs données personnelles de santé.
La souveraineté numérique est devenue cruciale dans le contexte géopolitique actuel. En santé, beaucoup de données sensibles transitent par des serveurs étrangers (notamment américains). Or, des lois comme le Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act (CLOUD Act, États-Unis, 2018) autorisent les autorités américaines à exiger des données stockées à l’étranger. Cela signifie que des entreprises américaines, même si elles hébergent des données au Québec, pourraient être contraintes de les communiquer aux services de renseignement des États-Unis. Des experts soulignent que « qu’une entreprise sous juridiction américaine pourrait être contrainte de répondre à une demande d’accès aux données » mêmes hébergées au Québec. Pour les citoyens et les professionnels de santé, cela crée une vulnérabilité grave : des dossiers médicaux et privés pourraient sortir du contrôle canadien. À ce titre, le Parti Québécois et la CAQ ont récemment insisté sur la nécessité de renforcer la souveraineté numérique du Québec pour « s’affranchir de certains monopoles des géants de la technologie ». Dans cette logique, ils préconisent notamment de « miser sur des logiciels libres » et de développer une expertise locale en santé numérique.
Pourquoi choisir le logiciel libre en santé ?
Pour un public non technique, il est important de souligner que « libre » ne veut pas dire « compliqué ». Au contraire, un logiciel libre est souvent facile à installer et à utiliser, même sans grandes compétences informatiques. Par exemple, le logiciel DoliMed (basé sur le ERP/CRM Dolibarr) est décrit comme « une solution simple d’utilisation pour gérer une activité de santé (patients, consultations, documents, etc…) », conçue pour les médecins, dentistes, kinésithérapeutes, infirmières, etc. Il est téléchargeable gratuitement et s’installe sur n’importe quel ordinateur ou serveur. De même, OSCAR EMR est un dossier médical électronique libre développé par des médecins pour leurs confrères. C’est une plateforme « free open source » qui compte une grande communauté de soutien au Canada. Pour un professionnel de santé ou un patient, le logiciel libre présente plusieurs avantages concrets :
- Coût réduit : les licences sont gratuites. Une PME peut donc adopter un DME sans frais récurrents de licence logicielle. Par exemple, choisir OpenEMR plutôt qu’un logiciel propriétaire comme Epic ou Cerner peut réduire drastiquement les dépenses informatiques.
- Contrôle des données : le code source étant ouvert, on peut s’assurer qu’aucune « fonction cachée » n’exfiltre les données. Les établissements de santé peuvent héberger le logiciel sur leurs propres serveurs au Québec, évitant ainsi les plateformes étrangères. Ce contrôle est renforcé par les obligations de la Loi 25 (Québec) : celle-ci exige désormais, par exemple, une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée (EFVP) avant toute communication de données personnelles hors Québec. Les organisations doivent informer explicitement si les données de santé peuvent être transférées à l’extérieur du Québec. En utilisant un logiciel libre hébergé localement, un cabinet médical respecte plus facilement ces exigences, car tout est transparent et auditable.
- Adaptabilité et continuité : le logiciel libre peut être adapté ou traduit selon les besoins (contrats, langues, formulaires locaux). Il n’y a pas de risque de « fin de vie » forcée du produit : la communauté ou l’établissement peut maintenir le projet à long terme. Par exemple, OSCAR a été adopté depuis des décennies au Canada sans jamais coûter de licences, grâce à l’engagement bénévole des médecins utilisateurs.
- Innovation communautaire : les projets open source en santé bénéficient souvent de contributions internationales. OpenEMR, par exemple, est « le logiciel de dossier de santé électronique open source le plus populaire au monde, maintenu par une communauté de passionnés bénévole », et disponible en 30 langues. Cela garantit des améliorations continues (sécurité, nouvelles fonctionnalités comme les télésanté, prescription électronique, etc.) sans surcoût.
- Choix souverain : le logiciel libre permet aux professionnels de choisir des prestataires locaux ou communautaires pour l’hébergement et le support. Cela réduit la dépendance aux « géants américains » de la santé numérique. Comme le souligne un article, « nous sommes mis à la merci de l’industrie du logiciel » en continuant de favoriser les solutions propriétaires. À l’inverse, choisir un DME libre, c’est choisir d’investir dans des compétences locales et dans l’indépendance technologique de la province.
Citant les critiques de la politique actuelle, on lit que « des systèmes open source comme OSCAR et VistA, développés à moindre coût, surpassent la plupart des systèmes propriétaires, en offrant aux contribuables d’importantes économies. » Le débat n’est plus qu’économique, mais fondamental pour la sécurité des données et la souveraineté : comme le rappelle l’Association InterHop, la vraie souveraineté numérique exige des technologies open source permettant l’audit et la maîtrise technique.
Exemples de solutions FOSS pour la santé
Voici quelques-uns des logiciels DME libres qui peuvent convenir aux cliniques et petites entreprises de santé :
- OSCAR EMR – DME canadien populaire, conçu par des médecins pour des cliniques familiales. OSCAR est entièrement open source (licence GPL) et soutenu par une communauté nationale. Il comprend la gestion des dossiers patients, rendez-vous, prescriptions, facturation, etc. (« OSCAR est un système DME conçu par des médecins, pour des médecins »). OSCAR a notamment été promu comme une solution peu coûteuse aux géants privés, et a fait la preuve d’importantes économies pour le système de santé.
- OpenEMR – Logiciel libre le plus répandu mondialement pour les dossiers médicaux et la gestion de pratique. Disponible en français, OpenEMR dispose d’un puissant carnet de rendez-vous, de modules de prescription électronique et d’un portail patient. Sa communauté active veille à sa certification et à sa conformité aux standards (par exemple ONC aux États-Unis). Comme le proclame leur site officiel, « OpenEMR est le logiciel de dossier médical open source le plus populaire, soutenu par une communauté dévouée, toujours gratuit ». Cette solution convient bien aux petites cliniques cherchant une plateforme flexible.
- OpenMRS – Plateforme mondiale open source de dossiers médicaux, utilisée dans de nombreux pays (surtout dans les pays en développement). OpenMRS est conçu pour être extensible et personnalisé selon les besoins locaux. La version française de leur site décrit OpenMRS comme « un système de dossier médical open source ou DME avec une communauté mondiale ». C’est notamment le « premier » projet open source de DME au monde. Bien qu’il requière un peu plus de configuration technique, OpenMRS peut servir d’ossature robuste à des cliniques et hôpitaux (exemples : certains pays africains ont mis en place un système national basé sur OpenMRS).
- GNU Health – Un écosystème libre de santé (systèmes hospitaliers, dossiers patients, etc.), promu par la Fondation de la Free Software Foundation Europe. GNU Health est développé comme projet social, visant à l’égalité d’accès aux soins. Sur son site, on présente GNU Health comme « un projet libre pour les praticiens, institutions et gouvernements : il offre les fonctionnalités de dossier médical électronique (EMR), de gestion hospitalière (HMIS) et de système d’information de santé ». GNU Health peut être installé sur un serveur local (« GNU Health en boîte ») afin de stocker toutes les données au sein de la clinique, sans dépendre d’aucun fournisseur externe.
- DoliMed (Dolibarr ERP/CRM) – Bien qu’il s’agisse à l’origine d’un progiciel de gestion, Dolibarr peut être étendu via un module DoliMed pour devenir un DME libre complet. Ce logiciel français est simple à prendre en main pour un médecin ou dentiste : patients, consultations, documents et prescriptions y sont gérés dans une interface claire. DoliMed fonctionne sur tout ordinateur et tout système d’exploitation, et est entièrement gratuit à installer par soi-même. Il est donc adapté aux petits cabinets (PME) cherchant une solution prête à l’emploi.
- FreeMedForms – Suite libre internationale de logiciels médicaux qui peut servir de dossier patient sur poste de travail. Bien que moins complet qu’un DME réseau, FreeMedForms permet la saisie et le suivi de données patients et fonctionne sur Linux/Mac/Windows. Il peut convenir à des professionnels ayant peu de patients ou en pratique libérale souhaitant une solution sur poste local.
- Open Dental – Logiciel open source de gestion de cabinet dentaire (dentistes), apprécié pour sa puissance et sa personnalisation. Bien que son site n’indique pas la licence ouvertement, la communauté le reconnaît comme open source (le code source est disponible sur GitHub). Open Dental est régulièrement cité comme un des rares DME libres spécialisés pour la dentisterie. Il offre des planifications de traitements dentaires graphiques, des facturations et se connecte à de nombreux appareils dentaires.
- Autres exemples – Il existe aussi des solutions modulaires et extensibles, comme ClearHealth, GNUmed ou ERPNext Healthcare, qui peuvent être adaptées. Certains petits hôpitaux du monde utilisent aussi des systèmes comme VistA (le DME des vétérans US, en version libre) ou des variantes de OpenClinic GA, etc. L’important est que la communauté FOSS en santé est vivante : de nouveaux modules se créent et partagent leur code.
Ces solutions démontrent que plusieurs projets open source existent pour toutes les spécialités médicales (généralistes, dentaires, paramédicales). Elles reposent sur l’adhésion d’utilisateurs locaux et souvent de prestataires québécois pour l’implémentation et le support, renforçant ainsi « l’expertise locale » soulignée par les autorités.
Souveraineté numérique et réglementation (Loi 25)
La souveraineté numérique se définit comme le pouvoir d’une nation ou d’une entité sur ses propres données et infrastructures numériques. Pour un citoyen ou un professionnel québécois, cela signifie savoir où résident ses données de santé et qui y a accès, sous quelle législation. Aujourd’hui, malgré l’hébergement éventuel au Québec, de nombreuses plateformes (cloud Azure, AWS, etc.) sont soumises au droit américain. Ainsi, InterHop rappelle que des lois comme le CLOUD Act et le FISA 702 donnent un accès extra-territorial aux autorités américaines sur des données mondialisées. Par exemple, la certification française Hébergeur de Données de Santé (HDS) n’empêche pas l’usage d’infrastructures américaines. De même au Canada, l’article 105 de la LPRPDE (fédérale) n’empêche pas des transmissions forcées. C’est pourquoi le Québec accentue sa vigilance : comme le rapporte le Journal de Québec, le gouvernement Legault a gelé un projet de Dossier santé numérique lié au groupe Epic (américain), par crainte de vulnérabilités liées au CLOUD Act. Lors de leur congrès, la CAQ a voté une résolution soulignant une « influence disproportionnée » des géants américains sur l’infrastructure numérique du Québec. Un amendement a même été adopté pour que le gouvernement renforce « la souveraineté numérique du Québec » face aux monopoles technologiques. Ces évolutions politiques signifient concrètement qu’on presse les décideurs de santé à choisir des solutions locales et transparentes – notamment du logiciel libre – plutôt que de confier nos données au hasard des règlements étrangers.
Dans ce contexte légal, la Loi 25 (Québec), entrée en vigueur progressivement depuis 2022, impose plusieurs mesures renforçant la protection des renseignements personnels. Elle instaure par exemple l’obligation de réaliser une Évaluation des facteurs relatifs à la vie privée (EFVP) pour tout projet informatique impliquant des données sensibles. Cette évaluation est particulièrement requise avant tout transfert de données à l’extérieur du Québec. Autrement dit, si un cabinet médical veut héberger un DME sur un serveur hors Québec (ou sous-traiter hors province), il doit d’abord prouver que la sécurité et la législation applicables sont équivalentes. De plus, l’organisme doit informer chaque personne concernée si ses données pourraient être communiquées à l’étranger. Enfin, la loi 25 souligne que les données médicales sont « sensibles » par nature, ce qui déclenche le régime le plus strict (consentement explicite, droits d’accès renforcés, etc.).
Dans la pratique, un logiciel libre géré en local aide au respect de ces exigences : il permet de garder physiquement les serveurs au Québec et de rendre compte facilement des flux de données. Les fonctions par défaut du logiciel peuvent être configurées pour maximiser la confidentialité (par exemple, accès uniquement sur réseau interne). Et si une PME externalise, elle pourra choisir un hébergeur canadien certifié, ou un fournisseur québécois, pour éviter le Cloud Act. En somme, utiliser un DME open source au Québec est cohérent avec les obligations de la loi 25 : la transparence du code (auditabilité) et le choix d’infrastructures locales facilitent l’obtention de consentements clairs et la démonstration d’une « protection adéquate » des données selon la loi.
Avantages pour les petites entreprises de santé
Les petites et moyennes entreprises (cliniques privées, cabinets de soins dentaires ou paramédicaux, cliniques de physiothérapie, etc.) ont tout intérêt à évaluer ces options FOSS. Les budgets de ces PME sont souvent très contraints : un logiciel libre ne leur coûte rien en licence, ce qui libère des ressources pour d’autres priorités (médicaments, équipement, formation, etc.). À l’inverse, un logiciel commercial génère des frais importants récurrents. Le journaliste médical Paul Webster notait qu’au Canada « des milliards de dollars sont gaspillés » à acheter des systèmes propriétaires coûteux, alors qu’« OSCAR et VistA [open source] offrent d’importantes économies aux contribuables ». Pour une petite clinique, une solution open source apporte donc une compétitivité immédiate.
L’autre point clé est la flexibilité et l’évolutivité qu’offre le libre. Une PME peut démarrer avec un serveur simple et ajouter des fonctionnalités progressivement (par exemple, module de facturation, téléconsultation, etc.) sans changer de système. Elles peuvent également choisir leur modèle de déploiement : sur site (« on-premise ») ou dans un nuage privé canadien. Beaucoup de solutions FOSS disposent d’une version « cloud ouverte » gérée par des prestataires indépendants; ainsi, l’entreprise n’est pas obligée de faire confiance aux GAFAM. On évite ainsi le scénario décrié par InterHop : payer une solution étiquetée « Made in USA/Quebec » qui en réalité stocke tout sur AWS, exposant les données au droit américain.
Enfin, l’adoption de DME libre favorise l’innovation locale et l’emploi au Québec. Comme le souhaitent les autorités, chaque clinique qui utilise un logiciel libre encourage la formation d’informaticiens et de spécialistes santé locaux. Par exemple, des entreprises québécoises (Akinox, e.g.) ont déjà développé des plateformes cliniques pendant la pandémie, mais elles ont été peu sollicitées par les grands projets publics. Promouvoir le libre, c’est permettre à ces acteurs régionaux de proposer leurs services aux cliniques. Un petit hôpital ou un groupe de médecins peut ainsi trouver un intégrateur québécois expert d’OpenEMR ou OSCAR, plutôt que d’être dépendant d’un contractuel étranger.
Conclusion
En somme, de nombreux logiciels libres de gestion de dossiers médicaux existent et sont adaptés aux besoins des cliniques et PME de santé. OSCAR, OpenEMR, OpenMRS, GNU Health, DoliMed, Open Dental, etc., offrent des outils complets (dossier patient, rendez-vous, prescriptions, facturation) sans coût de licence. Pour les médecins, dentistes ou thérapeutes québécois, ces solutions apportent coût maîtrisé, personnalisation et indépendance. Ils s’inscrivent naturellement dans une démarche de souveraineté numérique : en choisissant du FOSS hébergé au Québec, ils protègent les données de leurs patients des lois étrangères, respectent les exigences de la loi 25 et encouragent l’écosystème local. Comme le souligne un expert québécois, la question n’est pas seulement économique, mais éthique – « nous devons cesser d’être « sages » dans nos contrats publics et repenser nos choix technologiques en santé». Le recours aux DME open source peut être une partie de cette réponse, permettant de « reprendre le contrôle de nos données » au bénéfice de tous.
Sources : De nombreux travaux scientifiques et articles spécialisés montrent l’efficacité des systèmes FOSS en santé et les enjeux de souveraineté numérique. Par exemple, l’Organisation mondiale de la santé encourage le libre pour améliorer l’accessibilité des soins. Au Canada, des éditoriaux médicaux ont documenté les économies possibles grâce à OSCAR/VistA. Les dernières actualités québécoises soulignent aussi le rôle du libre dans la loi 25 et la sécurité des données. Les sites officiels des projets (OpenEMR, OpenMRS, etc.) confirment leurs caractéristiques FOSS. Ces sources confirment que la transition vers des solutions libres est à la fois possible et bénéfique pour la souveraineté numérique du Québec.